Les 400 millions d’euros « ne résoudront pas le problème d’un hôpital qui est en train de s’effondrer », déplore un pédiatre

Les 400 millions d’euros « ne résoudront pas le problème d’un hôpital qui est en train de s’effondrer », déplore un pédiatre

Le pédiatre Marc de Kerdanet est membre du collectif Inter-Hôpitaux qui attaque, avec des associations de patients et des collectifs de soignants, l’État pour « carence fautive » au niveau de l’hôpital public.

Quatre associations de patients et deux collectifs de soignants attaquent l’État pour « carence fautive » , accusé de ne pas avoir fait assez pour éviter la crise de l’hôpital. L’enveloppe de 400 millions d’euros d’aides pour les hôpitaux « ne résoudra pas le problème d’un hôpital qui est en train de s’effondrer » a déploré jeudi sur franceinfo Marc de Kerdanet, pédiatre et membre du collectif Inter-Hôpitaux.

franceinfo : Le gouvernement accorde une enveloppe de 400 millions d’euros d’aides aux hôpitaux dont 200 millions pour la pédiatrie. Cela reste insuffisant pour vous ?

Marc de Kerdanet : Le problème conjoncturel de la bronchiolite n’a fait que souligner le problème structurel sur lequel on travaille depuis bien longtemps. On a déposé une réclamation préalable le 8 juillet 2022, on a attendu jusqu’au 8 septembre qu’on nous réponde, ce qui n’a pas été fait. C’est donc une décision implicite de rejet de notre demande.

C’est très bien si on peut apporter quelques aides, mais cela ne résoudra pas le problème d’un hôpital qui est en train de s’effondrer. Chacun des membres du personnel est un étai [une pièce de charpente] pour la structure et ces étais s’en vont petit à petit. Les derniers qui restent ont encore plus à supporter et vont finir par tous s’écrouler. On est dans une situation catastrophique et on aimerait vraiment qu’à travers ce genre de démarche, l’État se remue un peu.

Mais que peut faire le gouvernement face au manque de candidats ?

Il y a des candidats mais ils sont partis, dégoûtés des conditions qu’on leur offre. Théoriquement, on compte une infirmière pour six à huit patients. S’il n’y a plus qu’une infirmière pour 20 patients, elle finit par s’en aller. On ne peut pas attirer des gens avec des conditions de travail comme celles-là.

L’accès effectif de la population à la prévention et aux soins est inscrit dans la loi. Il est écrit dans l’article L 1411-1 que la politique de santé relève de la responsabilité de l’État et c’est là-dessus qu’on s’appuie pour faire ce recours.

Que reprochez-vous à l’État ?

On l’accuse de carences fautives car il a continué à faire une politique qui consiste à faire des économies plutôt que d’organiser la médecine. L’État s’est davantage soucié d’une gestion financière des hôpitaux que de la santé des patients. La continuité du service public, la santé du personnel ne sont pas prises en compte dans ses décisions. On ferme des lits, on comprime le personnel, et après on s’étonne que ça craque. On a un paquebot et on met un équipage de voilier dedans, ça ne peut pas marcher.

Toutes les régions sont désormais concernées par l’épidémie de bronchiolite. Que faut-il faire ?

Ce qu’on fait d’habitude pour les soignants : tenir bon. Malheureusement on est au bout de la résilience. Cela fait 40 ans que je travaille et 40 ans que je vois des épidémies de bronchiolite tous les ans, il n’y a rien de nouveau. C’est parfaitement habituel, mais plus ça va, moins l’hôpital est prêt. On n’a pas de place pour recevoir les gens. Ce n’est pas un problème de nombre de lits mais bien de personnel. La réalité c’est qu’on ne tient plus. On est arrivé au bout d’un processus et le gouvernement doit s’en rendre compte.